Desc : Des garçons de province : Réalisé par Gaël Lépingle. Avec Léo Pochat, Serge Renko, Yves Batek Mendy, Edouard Prévot. On connaissait déjà le goût de Gaël Lépingle pour les petites villes de province, et son intérêt précis, insistant et souvent généreux pour leurs habitants et leur soif d'aventure, comme le montre son œuvre, de Julien (FID 2010) à Seuls les pirates ( FID 2018). Les villes de province sont ici montrées à travers le prisme du parcours de garçons qui aiment les garçons, narré par Gaël Lépingle comme trois contes se déroulant dans trois lieux différents, trois tranches de vie impliquant des choix. Dans chacun de ces contes, le réalisateur dépeint avec délicatesse diverses manières de vivre l'homosexualité, dans des lieux où cela est possible, ou parfois impensable, mais toujours en restant à l'écart du drame et des clichés habituels du genre. Dans la scène d'ouverture, un jeune homme semble rêver à une réalité différente de l'entreprise qu'il s'apprête à reprendre et de la vie conjugale qui l'accompagne ; il est attiré par la vie épicée d'une troupe de vaudeville queer se produisant dans son village. On suit ensuite les déambulations d'un adolescent, l'expérience improbable de sa silhouette élancée arpentant les rues de son village. On entrevoit enfin la passion fétichiste d'un professeur respectable, avant qu'il ne soit renvoyé sur le chemin du renoncement. Ces trois portraits finissent par composer une fresque. Gaël Lépingle devient le cartographe des territoires inexplorés du désir, dans des paysages dépourvus de qualités et de netteté, mais remplis de l'effroyable banalité des destins prédéterminés. Autant de chemins à parcourir et de décisions à prendre pour ces garçons de province. Lépingle délimite subtilement les impasses et les ouvertures, et s'attarde sur l'entre-deux : entre les mots et les corps, entre le désir et la vie sombre, entre les corps et les paysages, à la recherche de la juste distance entre les êtres. Avec le déguisement et ses possibilités comme formule secrète qui les relie tous. (Nicolas Feodoroff)